À la fin de mes études, j’avais encore des choses à prouver, alors je suis restée. Puis je suis tombée amoureuse et finalement je me suis retrouvée avec une carrière qui n’a rien à voir avec l’art, mais qui me comble. J'ai aussi une petite famille qui me comble encore plus.
Cependant, il m’arrive de me demander ce que ma vie aurait été si j’étais restée. Serais-je devenue professeure d’histoire de l’art comme je le souhaitais ? Est-ce que j’aurais des enfants et un amoureux aussi bien que ceux que j’ai ? Est-ce que j’aurais gardé contact avec mes copines ? Est-ce que j’aurais voyagé davantage ? Évidemment, je ne le saurai jamais. Et je n’ai pas de regrets face à ce choix. J’ai des regrets face à bien d’autres, mais pas celui-là. Au contraire, je pense qu’au bout du compte, c’est le meilleur choix que j’ai fait. Bon, j’ai eu des années sombres pour me rendre jusqu’ici. J’étais déprimée et esseulée. Je n’avais pas le sou et j'avais peu de confiance en mes moyens. Il y a à peine dix ans de ça, j’aurais ri d’incrédulité si on m’avait dit qu’à 35 ans je vivrais le parfait bonheur.
Probablement que ma vie n’aurait été ni meilleure, ni pire si j’étais restée à Montréal. Je serais assurément une version très similaire de moi en ce moment. Il reste que je suis contente d’avoir fait le « mauvais choix ». Je dis le mauvais choix, car c’était un choix pour ma carrière et ces études n’ont pas abouti comme je l’imaginais.
Parfois, je m’assois sur ma galerie. À la place de regarder les étoiles dans le ciel ou le jardin qui renait avec l’été, je regarde au travers de ma porte-patio. Je regarde ma petite table à café dans la cuisine et la salle à manger juste en arrière. Je regarde mes bibliothèques pleines de livres avec ses deux étagères réservées aux livres des enfants et aux jouets. Je vois chaque meuble et leur histoire. La table que Padou m’a donnée, les chaises IKEA qui m’ont causé une rage à assembler. Le tapis que maman m’a offert parce que le plancher d’un de mes appartements était horrible et les figurines de Buzz et de Woody qui trainent sur le plancher. Je regarde le mur que je voudrais repeindre et la céramique de la cuisine qui est faite tout croche par le bricoleur amateur qu’est Superpapa. Alors que je vois ma vie dans cette petite maison de Schtroumpf, je me rends compte combien mes choix ont défini qui je suis aujourd’hui.
Je manque encore terriblement confiance en moi. Je suis toujours aussi anxieuse. J’ai toujours peur de ne pas être à la hauteur. J’ai toujours l’impression que j’ai quelque chose à prouver. Sauf, que je suis devenue une maman et une femme qui a une carrière florissante. Mais je suis aussi l’amoureuse de Superpapa et je suis heureuse d’avoir eu mes moments de noirceur pour atteindre ce moment-ci qui me semble si proche de la perfection.
Crédit photo: © Evely
3 bouteilles à la mer...:
Quel beau texte ce matin ,pour débuter ma journée!!
Je me pose régulièrement les même questions, mais le plus fascinant, c'est de se demander quelles décisions pendront nos enfants et où elles les mèneront.
Très beau billet qui me touche de près. Ça doit l'effet que donne une formation en arts ;) Merci du partage!
Enregistrer un commentaire